LE LANGTANG, 6 MOIS APRES...

Le premier état des lieux complet de la région jamais réalisé

Trekking solidaire du 14 septembre au 4 octobre 2015


INTRODUCTION :

Avant de venir en aide et de commencer la partie opérationnelle de son projet, l’association Nepatrek Solidarité a jugé obligatoire d’effectuer, dans un premier temps, une mission de reconnaissance complète dans la région qu’elle souhaite aider, le Parc National du Langtang. Cette mission avait pour but de faire le point sur la situation humanitaire, sanitaire et le taux de destruction des villages, dans une région qui figure parmi les plus dévastées du pays.

Région fortement touristique, le Langtang se retrouve aujourd‘hui déserté de toute présence étrangère et n’a, jusqu’à maintenant, jamais vu une seule équipe internationale faire un tour d’horizon complet de toute la région.

Coordinatrice de la mission, l’agence de trekking Nepatrek en a aussi profité pour faire un état des lieux du tourisme, destiné à informer les professionnels et individuels des conditions d’accueil, de sécurité et d’état des chemins.

Nepatrek Solidarité et ses collègues de Nepatrek, accompagnés de leur première cliente de la saison, sont ainsi la première équipe non Népalaise à s’être rendue dans la région entière et peut ainsi rendre compte de la situation sanitaire, des projets en cours,  du nombre de touristes présents, des conditions de sécurité et du taux de destruction des villages.

La Mission s’est faite sous forme de trek solidaire, un projet né de la volonté de l’agence Nepatrek, désireuse d’apporter un soutien supplémentaire aux missions d’aide de l’association Nepatrek Solidarité.

Nepatrek est ainsi la première agence à avoir lancé le concept de trek solidaire ; une bonne façon d'aider la région, à la fois par une présence physique, l’apport d’un soutien moral, mais aussi une façon de remettre en route l’économique locale dans de nombreux villages. L'agence ne prend ainsi aucune marge sur ses forfaits et réinvestit les bénéfices de ses treks dans ses projets autofinancés.

Ce trek s’est déroulé du 14 septembre au 4 octobre 2015, soit 21 jours et quelques 120 km de trek sur tous les chemins majeurs de la région et dans tous les villages à l’exception de la vallée de Langtang (encore fermée lors de notre passage fin septembre en raison de la dangerosité du terrain et de l’absence de chemin par endroits).

REGION DU LANGTANG :

Située à 120 Km au nord de Kathmandu, la région du Langtang et son Parc National se situent dans le district de Rasuwa et représentent le troisième pôle de trekking du Népal après l’Everest et l’Annapurna. Cette région Himalayenne abrite un peuple ayant conservé toutes ces traditions ancestrales composé en majorité de l’ethnie Tamang et de Tibétains. On trouve ainsi dans la région de nombreux villages typiques faits de pierres et de bois, de nombreux shamans et une population en habits traditionnels, en plus de tous les attraits naturels que présente la région. Véritable paradis du trekking abordable par tous, le Langtang est aujourd’hui une zone particulièrement touchée par le séisme du 25 avril 2015. Elle représente, après le district de Sindupalchowk et la zone de Gorkha (lieu de l’épicentre) la 3ème région la plus sinistrée du pays, mais une des moins aidées en matière de reconstruction du fait de la complexité d’accès par les voies terrestres (éboulements, glissements de terrain, route fermée régulièrement pendant la mousson…). Il n’y a en effet qu’une seule route permettant d’accéder à la région et elle est régulièrement fermée car très exposée aux contraintes naturelles. Géologiquement, la région du Langtang est une zone très escarpée ou les montagnes sont extrêmement pentues. De nombreux villages ont donc été dévastés non pas par le séisme mais bien par des éboulements. L’érosion se retrouve en plus accélérée par les nombreux torrents et infiltrations d’eau, rendant ce terrain très instable, chose que l’on ne peut prévoir par une simple observation.

Le Langtang, plus précisément les villages de Syabru Besi et Thulo Syabru, est la région dont l’agence Nepatrek est spécialiste. Il va donc de soi que c’est sur cette région que nos efforts sont concentrés pour tenter de redonner à chacun de bonnes conditions alimentaires, sanitaires et sociales.


SYABRU BESI (1500m) : La situation est assez positive. Si une partie du village a été détruite, on constate toutefois que tout se reconstruit rapidement.

Ce village est le point de départ des treks du Tamang Heritage, de Gosaikunda et du Langtang. Le village de 400 habitants comptait environ 200 maisons, une trentaine est aujourd’hui détruite. Parmi la trentaine de guest-houses présentes, 19 sont en bon état, prêtes à accueillir les touristes. La quasi-totalité des autres est en cours de réparation.

Le village compte 5 morts. 1/3 des habitants vit toujours sous des bâches ou abris provisoires.

New Syabru Besi (la ville nouvelle) a beaucoup été touchée mais se reconstruit rapidement grâce à la route qui a été rouverte et permet l’acheminement de toutes les ressources nécessaires. L’école se trouve sous un couloir d’éboulement mais est cependant en bon état. En attendant de trouver une solution assurant la bonne sécurité des enfants, les cours ont lieu sous des tentes et des abris en tôles ondulées. Le poste de secours a été complètement détruit mais est en cours de reconstruction. En attendant, les soins sont assurés sous des tentes offertes par l’UNICEF et une équipe de 6 bénévoles assure la permanence. Le monastère est sur le point de s’effondrer. Aucun projet de reconstruction pour le moment.

On constate que beaucoup d’aide est arrivée ici grâce à la route menant au Tibet. Toutes les familles ont de nombreux sacs de riz et plusieurs autres aliments secs fournis par diverses ONG.

La situation est donc très encourageante dans ce village qui se reconstruit. Les touristes peuvent venir ici comme avant, avec tout le confort habituel.

En revanche, la situation est beaucoup plus triste dans le hameau d’Old Syabru Besi (le village historique) qui a été détruit à 90%, à la fois par le séisme et les nombreux éboulements. Sur les 25 maisons présentes, seuls le monastère (en construction depuis plus d’un an) et une maison ont résisté. Tout le reste est à terre ou sur le point de l’être. Ce village qui auparavant était animé et avait un charme incroyable est aujourd’hui à terre. Nous en sommes très tristes, d’autant plus que les parents de notre vice-Présidente y avaient leur petite maison, seule maison du village où on pouvait dormir chez l’habitant et dont toute la partie arrière a été emportée par un glissement de terrain.


SECTEUR TAMANG HERITAGE


INTRODUCTION :

En 6 jours de marche dans la région, nous n’avons vu aucun touriste alors que le trek représente la principale source de revenus de la zone. Même les check-posts sont fermés. Notre constat est que presque tous les villages de la zone ont été fortement endommagés par le tremblement de terre. Pour autant, le trek peut de nouveau se faire normalement, les sentiers ont été remis en état, tous les villages sont capables d’accueillir les trekkeurs en guest-houses et l’intérêt culturel reste toujours aussi présent.

Source : Himalayan Map House
Source : Himalayan Map House

Notre itinéraire :

Syabru Besi – Gatlang – Tatopani – Thuman – Timure – Briddhim – Syabru Besi.


GATLANG (2240m) : La situation est ici catastrophique. Le village compte environ 1800 habitants pour 400 maisons dont 80% sont aujourd’hui détruites. Sur les 7 guest-houses et homestay, 2 sont aujourd’hui en réparation et seront terminés sous 1 mois.

4 décès ont été répertoriés. 90% des gens vivent encore aujourd’hui sous des abris provisoires.

Malgré la route qui est aujourd’hui bonne, peu d’aide est arrivée ici. Seules 2 ONG et quelques initiatives individuelles ont pu apporter tôles, nourriture et autres équipements. On constate que la partie haute a relativement été épargnée, alors que la partie basse du village (historique) a littéralement été soufflée.

Faute de touristes, les habitants se focalisent aujourd’hui sur la production de haricots blancs qui sera la principale source de revenus de la saison.

Nous avons de plus remarqué un point très triste : peu de temps avant le tremblement de terre, l’ONG Tourism for Rural Poverty Alleviation Programme était intervenue à Gatlang pour financer la construction d’un tout-à-l’égout, d’un chemin en dur et de caniveaux destinés à favoriser de meilleures conditions sanitaires. Ironie du sort, une fois le chantier terminé, le séisme a tout balayé.

 

CHILIME (1760m) : Rien à signaler dans ce village qui a été relativement peu touché et très aidé par les projets de centrales hydro-électriques en cours dans la région.


TATOPANI (2600m) : La situation est très positive dans ce village qui compte environ 25 maisons dont une dizaine de guest houses. Toutes les guest-houses sont en excellent état et raison de leur fabrication exclusivement composée de bois.  Aucune victime n’est à déplorer dans ce village.

Les sources d’eau chaude ont quant à elle un peu souffert puisqu’un seul bassin était rempli sur les trois présents lors de notre visite. Toutefois, l’eau reste très chaude, propre et les autres bassins vont être réparés.


NAGTHALI (3165m) : Rien à signaler dans ce hameau composé exclusivement de guest houses. Les conditions d’accueil sont identiques à auparavant.

 

THUMAN (2340m) : La situation est catastrophique dans ce village qui a été presque entièrement rasé. Le village compte 650 habitants pour 250 maisons dont 70% sont détruites. Les 7 guest-houses du village sont en bon état. Tout comme Gatlang, le village ancien est totalement détruit, le monastère a beaucoup souffert, l’école et le poste de police également. Ce village compte 6 morts, dont 4 au village de Langtang. A ce propos, nous avons fait la connaissance de Lakpa Yangjen, 28 ans, mère de 2 enfants de 5 et 10 ans, dont le mari est décédé à Langtang. Cette rencontre nous a touchés, nous allons aider cette jeune femme en finançant la scolarisation de ses enfants.

 

Précision sur l’état du sentier :

L’itinéraire normal du Tamang Heritage Trail vous conduit en théorie de Thuman à Briddhim via Ling-Ling. Cet itinéraire n’est aujourd’hui plus possible en raison d’un éboulement ayant détruit le pont suspendu de Ling-Ling.  Il faut maintenant aller de Thuman à Dal Phedi, puis Timure. Il est préférable de séjourner une nuit à Timure, puis aller à Briddhim le jour suivant. Cet itinéraire nécessite de prendre un guide local expérimenté car les chemins à emprunter ne figurent sur aucune carte. Le pont devrait être réparé dans les prochaines semaines.

 

Indications de temps de marche :

- Thuman → Dal Phedi : 3h

- Dal Phedi → Timure : 45min

- Dal Phedi → Briddhim : 3h30

- Timure → Briddhim : 4h

 

TIMURE (1760m) : La situation, ici aussi, est catastrophique.

Ce village compte 600 habitants pour 122 maisons dont 85% sont détruites. Sur les 6 guest-houses présentes, 2 sont capables d’accueillir des touristes et 2 autres sont en réparation. Le vieux village historique est anéanti ; il n’y reste que des tas de pierres. L’école a fortement souffert, les cours se font sous des tentes. Nous faisons toujours le même constat : tous les villages traditionnels sont détruits, tandis que les maisons modernes ont relativement bien résisté. Autre constat, les maisons faites en majorité en bois ont, elles aussi, bien résisté. Nous avons recensé 8 décès dans ce village.

 

RASUWAGADHI (1810m) : Nous ne sommes pas allés dans ce village mais avons jugé utile de rapporter les informations qui nous ont été données. Cette localité se trouve à la frontière Tibétaine et sera très prochainement un point stratégique d’échange commercial Chine – Népal – Inde. Des centaines de personnes  se  trouvent  en  permanence  à  cet  endroit  pour,  à  la  fois,  développer  les  échanges commerciaux entre Chine et Népal, construire la route d’accès côté Népalais, mais aussi construire des centrales hydro-électriques.

Nous savons de source sûre que plus de 50 personnes et une vingtaine de voitures ont été ensevelies par des éboulements. Le nombre exact de décès est difficile à déterminer car il y avait des Chinois, des Indiens et des Népalais sur les lieux au moment du séisme.

 

LING-LING (1740m) : Ce hameau compte 2 personnes décédées lors de l’éboulement ayant détruit le pont suspendu. 2 Tea-houses sont capables d’accueillir les trekkeurs pour une pause mais il est préférable de prévoir le repas de midi à Briddhim en raison de l’état des maisons et du manque de confort.

 

BRIDDHIM (2230m) : La situation est un peu plus favorable que les villages visités jusqu’à ce jour avec un taux de destruction avoisinant les 20%. Le village compte 300 habitants et 53 maisons. 1 décès a été recensé. Le monastère très ancien a en parti été détruit. Le village comptait 12 guest-houses et 14 homestay, à peu près tous sont encore en très bon état.

 

Précision sur l’état du sentier :

L’itinéraire classique vous conduit de Briddhim à Syabru Besi via Wangal. Cet itinéraire est aujourd’hui techniquement faisable mais, en raison de l’instabilité du terrain et de la construction d’une route, cette saison il est préférable de prendre le sentier passant par Khanjim. Lors de notre trek, le bulldozer construisant la route a provoqué une chute de pierres provoquant la mort d’un habitant de Wangal.

Le temps de marche Briddhim – Khanjim – Syabru Besi est de 4h.

 

KHANJIM (2280m) : La situation est ici similaire à ce que nous avons pu voir jusqu’à maintenant. Le village compte une centaine d’habitants, environ 25 maisons dont la moitié est à réparer. Sur les 7 guest-houses, 4 sont en état correct. 2 personnes de ce village sont décédées à Langtang.

 

CONCLUSION :

La zone est en état critique par endroit. De nombreuses personnes sont aujourd’hui incapables de reconstruire leurs maisons, les obligeant à rester pendant une durée indéterminée dans des abris en bois et tôles ondulées. L’hiver approche, nous nous inquiétons pour ces centaines de personnes qui n’ont aucune solution d’hébergement. La situation scolaire est elle aussi dans un état critique ; toutes les écoles de la zone sont en effet détruites ou en état inapproprié pour accueillir des enfants. Les cours se font donc de façon anarchique, avec un sous-effectif flagrant d’instituteurs et de moyens matériels. 6 mois après le tremblement de terre, plus aucune (ou presque) ONG n’intervient dans la région ; les solutions doivent donc venir d’initiatives personnelles ou de projets communautaires.

Nous estimons obligatoire que le tourisme revienne ici le plus urgemment possible. En 6 jours de marche, nous n’avons croisé AUCUN trekkeur, alors qu’en temps normal plus de 20 nouvelles personnes arrivent chaque jour sur ce trek. Favoriser le retour du tourisme dans la région, c’est favoriser la reprise de toute l’économie locale (guest-houses, guides, porteurs, agriculteurs, transporteurs, épiceries…), mais c’est aussi favoriser des échanges entre populations locales et trekkeurs qui pourraient financer certains projets de reconstruction (écoles, monastères, maisons individuelles…).


SECTEUR GOSAIKUNDA


INTRODUCTION :

En 7 jours de marche depuis Syabru Besi, nous avons pu constater que ce trek présente une situation très contrastée. Tout le versant nord (côté Langtang) du trek a relativement bien été épargné et la quasi-totalité des villages de la zone sont en pleine capacité d’accueillir des touristes comme avant. Nous avons même été, en quelque sorte, rassurés de constater que quelques groupes de trekkeurs commençaient à revenir dans la région.

Ce n’est en revanche pas du tout le cas du versant sud (côté Helambu) qui a été dévasté. Cette zone ne figurant pas dans nos plans d’aide et tellement de témoignages nous attestant que l’Helambu a été lourdement sinistré, nous avons fait le choix de ne pas franchir le Lauribina Pass (4600m) et de ne nous focaliser que sur la partie Langtang. Dans tous les villages, certains établissements sont en cours de reconstruction, mais tous ont été désertés de leurs habitants le temps de retrouver des conditions de vie convenables, à l’image de Melamchigaon et Tarkeghyang où il est aujourd’hui compliqué de trouver chambres et nourriture. Si les conditions de terrain et d’accueil (guest-houses) permettent le trekking, nous estimons qu’il serait déplacé d’envoyer des groupes dans une zone aussi sinistrée cette saison, où tous les habitants n’ont plus de quoi se loger et où les structures d’accueil de touristes ont presque entièrement disparu.

 

Notre point de départ, Sanu Barkhu.

Normalement pas prévu sur l’itinéraire du trek de Gosaikunda, nous avons toutefois voulu commencer notre tour d’horizon par le village de Sanu Barkhu. Ce village se trouve en effet être le point de départ du projet de construction d’une route Sanu Barkhu – Brabal – Thulo Syabru que nous souhaitons aider. Il nous a été rapporté à maintes reprises que cette route était la condition majeure pour reconstruire les villages de Brabal et Thulo Syabru. C’est pour cette raison que nous souhaitons aider ce projet et que nous avons donc voulu parcourir cet itinéraire afin de prendre connaissance du travail à réaliser et la distance restante avant de parvenir jusqu’à Thulo Syabru. 

 

Notre itinéraire :

Sanu Barkhu – Thulo Syabru – Shing Gompa – Laurebina – Gosaikunda – Mukharka – Thulo Syabru – Syabru Besi.

Source : Himalayan Map House
Source : Himalayan Map House

SANU BARKHU (1660m) : Si quelques maisons ont été endommagées, le village de 40 maisons a cependant bien résisté au séisme et ne compte aucun décès.

 

BRABAL (2280m) : A l’image du reste de la région, ce village de 32 maisons et 100 habitants a beaucoup souffert. Seules quelques rares maisons ont bien résisté et 2 personnes du village sont décédées à Rasuwagadhi. Nous espérons que la reconstruction puisse se faire rapidement grâce à la route qui desservira Brabal dans les prochaines semaines.

 

THULO SYABRU (2240m) : Ce village est celui que nous allons le plus aider. Il est le berceau de toute la famille de notre vice-Présidente et est le deuxième village le plus dévasté après Langtang. La situation est ici critique car l’aide internationale n’est pas beaucoup intervenue en raison de son éloignement de la route engendrant des frais de logistique conséquents. De plus, 80% des gens ignorent s’ils reconstruiront leur maison dans ce village : certains ont en effet vu leur terrain s’effondrer et laisser place à une falaise, d’autres n’ont pas les moyens de reconstruire et les autres ont peur de reconstruire dans un village qui a vu disparaitre presque 100% des maisons.

Nous avons décidé d’injecter près de 6 500 € (soit 60% de notre budget) dans nos projets pour ce village. Cette somme sera répartie en trois axes : la construction de la piste Sanu Barkhu – Brabal – Thulo Syabru, la reconstruction de maisons et l’acheminement de 4 tonnes de vivres nourrissant 800 habitants.

Sur 146 maisons recensées, 4 sont encore debout et en bon état. Le village compte 700 habitants dont 90% vivent dans des abris en tôles et bâches. 4 personnes y sont décédées.

Sur 18 guest-houses, seules 3 sont en mesure d’accueillir les trekkeurs, mais la plupart des groupes ont choisi de débuter leur trek à Dhunche et non Syabru Besi. Le village se retrouve donc aujourd’hui ignoré. On nous a rapporté que l’Etat avait financé la construction d’un abri en dur destiné à protéger toutes les statues et objets du monastère. Les cours d’école se font maintenant sous des abris en tôles ondulées et nul ne sait quand la réparation de l’établissement pourra débuter. On déplore un flagrant manque d’aide internationale dans ce village, aggravé par de nombreuses promesses d’aide n’ayant jamais abouti. Toutefois, les propriétaires de guest-houses sont souvent bien aidés financièrement grâce à leurs nombreux clients et amis internationaux. Mais ce sont tous les autres villageois qui risquent de souffrir du manque d’aide.

 

Important :

Nous sommes outrés par l’attitude de certains villageois de Thulo Syabru qui n’hésitent pas à pleurer de l’aide financière étrangère pour aider leur village et une fois l’argent reçu, ces personnes peu scrupuleuses gardent tout l’argent pour elles et envoient à leurs donateurs des photos d’autres missions d’aide en leur faisant croire qu’ils ont utilisé l’argent équitablement. Ces agissements sont intolérables quand on voit la situation actuelle du village. Les personnes concernées seront bien sûr dénoncées, sanctionnées et révoquées de toute aide de notre part. Nous ignorons quel montant total a ainsi été détourné, mais le préjudice pourrait facilement avoisiner 20 000 €, selon les rumeurs circulant, ce qui est considérable.

 

Nos mesures pour garantir une aide équitable et aucun détournement :

1 – Ne jamais donner aucune somme d’argent. L’aide doit arriver en nature.

2 – Gérer la totalité des projets sans aucun intermédiaire.

3 – Ce n’était pas prévu par notre équipe mais cela s’avère aujourd’hui nécessaire : floquer des T-shirts (portés par tous nos bénévoles) et une banderole (fixée au camion qui convoiera notre logistique) à l’effigie de notre association. Cette mesure empêchera toute personne d’utiliser des photos de nos missions d’aide à des fins personnelles. Cette mesure a un coût mais il est indispensable d’empêcher ses malfrats d’agir. Fort heureusement, nous avons trouvé un imprimeur sensible à notre cause et prêt à nous aider financièrement.

4 – Surveiller les réseaux sociaux, véritable mine d’or d’informations à ciel ouvert.

 

PHOPRANG (3000m) : Il ne s’agit pas d’un village mais la plupart des groupes s’arrête dans ce hameau de 2 maisons pour prendre un déjeuner avec balcon sur le Ganesh Himal. Les deux maisons sont aujourd’hui détruites mais sont en cours de reconstruction. Les groupes peuvent cependant s’y arrêter comme avant, un service complet de restauration en extérieur est assuré malgré la dégradation des bâtiments.

 

SHIN GOMPA (3250m) : Ce village a bien été épargné, seule 1 maison a été en partie détruite, toute les autres sont déjà en cours de réparation. Le monastère, en revanche a subi beaucoup de dégâts mais devrait pouvoir être réparé. Sur les 4 guest-houses du village, 2 sont en état normal et les deux autres sont en réparation.

C’est à partir de Shin Gompa que nous commençons à rencontrer un flux plus ou moins régulier de touristes. Nous en déduisons que l’activité touristique a repris doucement son activité sur le trek de Gosaikund. Shin Gompa est en effet le point de convergence entre les sentiers venant de Syabru Besi et de Dhunche. Nous comprenons alors que l’itinéraire du trek a quelque peu changé depuis le séisme ; les trekkeurs ne commencent plus leur trek à Syabru Besi mais à Dhunche. Toute la zone Syabru Besi – Thulo Syabru – Langtang a été fuie par les touristes et les agences de trekking locales.

 

CHYOLANGPATHI (3580m) : Rien à signaler sur ce hameau de 2 guest-houses. Les trekkeurs peuvent revenir prendre leur déjeuner et déguster la bonne cuisine préparée comme avant avec des légumes locaux bio.

 

LAUREBINA (3900m) : Si le hameau est capable d’accueillir les trekkeurs dans de bonnes conditions, Laurebina a toutefois beaucoup souffert du tremblement de terre. Sur les 4 guest-houses du hameau, 2 ont totalement été détruites mais les deux autres sont en bon état.

 

GOSAIKUNDA (4380m) : Rien à signaler sur ce village. Les 4 guest-houses ont un peu bougé mais elles ont d’ores et déjà été réparées et sont totalement opérationnelles.

 

SITUATION SECTEUR HELAMBU : Nous l’avons déjà évoqué, la situation de l’Helambu est catastrophique, selon nos sources. N’ayant pas visité nous-même la région, nous ne réaliserons pas de bilan précis mais pouvons cependant donner un état global.

Un trek peut être réalisé dans la région, les conditions sont sûres, mais les structures d’accueil sont devenues quasi inexistantes et la nourriture également. En bref, un groupe de 4 personnes ou moins peut envisager un trek en guest-houses ou chez l’habitant. En revanche, les groupes supérieurs à 4 personnes doivent envisager de dormir sous tente et acheminer leur nourriture.

Pour ceux qui envisagent de basculer côté Helambu par le Lauribina Pass (4600m), une étape est possible à Phedi où 1 guest house en bon état a de nouveau ouvert ses portes. Les hameaux de Ghopte et Tharepati ont quant à eux été anéantis. Seule 1 guest-house en état précaire subsiste à Tharepati.

 

MUKHARKA (2950m) : Ce hameau agricole comptait 2 guest-houses dont une a été détruite mais elle est en réparation. Nous pensons que ce hameau peut être une bonne alternative à l’Helambu car il offre une belle vue sur les sommets enneigés et se trouve tout proche de la « Red Panda Area », une zone sauvage dont la faune et la flore sont très riches. De plus, passer par ce village évite aux trekkeurs de faire un aller-retour.

CONCLUSION :

Le bilan de cette zone est lui aussi très contrasté. Si l’activité touristique a été divisée par 10, nous avons toutefois été rassurés de voir quelques groupes de trekkeurs parcourir le trek, ce qui est un bon signe pour l’avenir. De plus, plusieurs alternatives sont possibles pour éviter de traverser des zones dangereuses ou des villages dévastés. Les dégâts, de façon globale, sont mineurs, mais suffisamment conséquents pour détourner les touristes vers d’autres itinéraires et délaisser complètement plusieurs villages.

 

Un itinéraire modifié :

Pour les puristes, le trek de Gosaikunda peut techniquement se faire comme auparavant. Mais compte tenu de la situation actuelle en Helambu, l’agence Nepatrek a fait le choix de ne pas envoyer de groupes cette saison dans ces contrées, par respect pour les populations locales.

Un itinéraire alternatif, tout aussi intéressant, sûr et confortable peut être réalisé, c’est celui que suivra l’agence cette saison :

Syabru Besi – Thulo Syabru – Mukharka – Laurebina – Gosaikunda – Shin Gompa – Dhunche. 


SITUATION VALLE DE LANGTANG : Le village de Langtang compte à ce jour 186 décès et est aujourd’hui anéanti. Le village, capitale culturelle de la région, n’existe plus et ne sera pas reconstruit à cet endroit. Beaucoup de questions se posent à ce sujet. Les Langtangpa doivent bien sûr retrouver des conditions de vie satisfaisantes et surtout pouvoir reconstruire leurs maisons. Le terrain étant beaucoup trop exposé aux éboulements et avalanches, le Parc National a décidé qu’il fallait déplacer le village mais nul ne sait encore où. L’Etat a déjà officialisé le fait qu’aucun terrain public ne sera cédé ; il faudra donc que la reconstruction se fasse en terrains privés, entre Kyanjin Gompa et Tangshyap, ce qui sera extrêmement compliqué à réaliser. Par ailleurs, les gens ont très bien compris que les maisons en pierre ne sont pas sûres et fragiles face à un tremblement de terre. Les populations ont donc demandé au Parc National de fournir du bois pour reconstruire des maisons fiables, chose qu’il ne fera pas.

La vallée se retrouve donc aujourd’hui avec des habitants sans maison, sans village et sans solution. La plupart de ces gens étaient jusqu’à maintenant logés à Kathmandu dans le Yellow Gompa, ils retournent tous petit-à-petit dans leurs contrées pour essayer de débloquer la situation.

Seul geste que l’Etat a fait jusqu’à présent,  accepter que des guest-houses supplémentaires soient construites dans les hameaux de Rimche, Lama Hotel, Riverside, Chunama et Ghoratabela, hameaux se situant sur les terres du Parc National.

La plupart des Langtangpa ont aussi bénéficié de formations au tourisme (accueil, gestion de guest-house, portage, guidage…) mais tout ceci de rime à rien si les Langtangpa n’ont pas de structure d’accueil.

Des moyens ont aussi été débloqués pour refaire le sentier Sherpagaon – Ghoratabela – Langtang, jusqu’à mi-octobre totalement impraticable et même dangereux. Une centaine de personnes ont travaillé sur le chantier qui est maintenant terminé.

Notre équipe ira sur les lieux dès début novembre afin d’établir un état des lieux et rendre compte aux structures touristiques la situation des lieux et la faisabilité d’un trek dans la zone.

Nous ne nous faisons que très peu d’illusion sur le futur proche de la vallée qui est aujourd’hui totalement désarmée face aux décisions politiques. Cette zone touristique reconnue mondialement n’est pas près de retrouver la prospérité économique dont elle faisait preuve avant le 25 avril.

Nous savons dores et déjà que l’itinéraire initial du trek du Langtang Syabru Besi – Lama Hotel – Langtang – Kyanjin Gompa ne pourra plus jamais être réalisé. Nous tablons plutôt aujourd’hui sur un itinéraire Syabru Besi – Sherpagaon – Ghoratabela – Kyanjin Gompa. Mais sachez à l’heure d’aujourd’hui seuls Sherpagaon et Kyanjin Gompa sont capable d’accueillir des touristes en guest-houses et dans des conditions précaires. 


CONCLUSION DU RAPPORT :

 

La conclusion que nous pouvons faire sur ce rapport d’état des lieux est que la situation est très contrastée. Nous avons d’un côté la zone Tamang Heritage qui a extrêmement souffert du séisme et qui se retrouve aujourd’hui désertée de touristes à quasi 100% et de l’autre côté la zonee Gosaikunda, moins détruite et où le tourisme reprend fébrilement son activité. Que ce soit dans le secteur Tamang Heritage ou Gosaikunda, nous constatons que les villages concernés par le tremblement de terre (fortement ou non) souffrent de deux problèmes majeurs : non seulement ils ont subi des dommages conséquents au niveau matériel et culturel, mais ils ont en plus été ignorés des touristes, privilégiant soit de trouver des itinéraires alternatifs dans la région du Langtang, soit en se tournant plus radicalement sur d’autre régions (Annapurna, Everest, Mustang) comme le recommandent les agences de trek internationales. C’est cette deuxième option qui est majoritairement retenue.

 

Le deuxième constat majeur que nous pouvons faire sur cet état des lieux, c’est que tous les groupes que nous avons rencontrés (organisés par des agences locales ou en autonomie) manquaient d’informations sur les conditions de trek dans la région. Même les guides Népalais ne savaient pas s’ils trouveraient des guest-houses dans certains villages (Thulo Syabru, Phedi, Laurebina, Gosaikunda) et avaient donc préféré l’option camping pour palier à tout imprévu, alors que toute la région est techniquement capable d’accueillir les touristes en guest-houses. Les treks en camping sont très néfastes pour ce genre de région car ils n’apportent aucun centime à l’économie locale et ceci uniquement à cause d’un manque d’information.

 

Nous sommes donc convaincus que ce genre d’état des lieux était nécessaire et même inéluctable pour, à la fois donner un point de vue objectif sur la situation globale de la région, mais aussi et surtout inciter les touristes à revenir dans ce si beau Parc National du Langtang dont l’hospitalité des habitants n’est plus à présenter.

 

A notre sens, sans touristes, cette région aura beaucoup de mal à se reconstruire. A coup sûr les propriétaires de guest-houses pourront, avec le temps, se reconstruire une nouvelle vie, mais le problème majeur concerne tous les travailleurs indirects du tourisme (agriculteurs, porteurs, petites boutiques en tous genres, employés de guest-houses, …) qui ont des revenus relativement bas et qui se retrouvent aujourd’hui sans argent ni emploi.

 

Si nous savions avant cette première mission que la région avait besoin d’aide, nous sommes aujourd’hui convaincus que notre action aura du sens, à condition de travailler de façon autonome, équitable et intelligente.

  

Ce rapport est la propriété de l’association Nepatrek Solidarité mais reste disponible et consultable par tout utilisateur, qu’il représente une entreprise, organisation à but non lucratif ou à titre privé, s’il en fait expressément la demande.

Notre but est qu’il soit justement consulté le plus largement possible afin de donner un regard objectif sur la région et surtout que le Langtang ne soit plus connu comme un village anéanti et meurtri mais comme une région de trek majeure qui saura se relever comme le reste du pays et vous accueillir d’une façon dont seuls les Tamang sont capables de le faire.


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