CORONAVIRUS AU NEPAL - LE POINT


L'Europe sous contrôle ; l'Asie du Sud à la dérive...


Nous faisons le point pour vous - bilan actuel, projections et perspectives de voyages.


Kathmandu, le 7 juin 2020.

 

Alors que l'Europe semble sous contrôle, que les cas de Coronavirus deviennent marginaux et que les populations peuvent tout doucement envisager une reprise "normale" de leur rythme de vie, c'est un bilan bien plus contrasté que nous ferons aujourd'hui sur la situation au Népal.

 

Au jour où cet article est rédigé, le Népal en est à 3 235 personnes infectées et 13 décès. Son grand voisin indien vient quant à lui de dépasser l'Italie avec 236 657 personnes infectées et 6 642 décès.

Objectivement, si on ne se base que sur les chiffres, le bilan Népalais semble plutôt prometteur si on se reporte à la population du pays qui avoisine les 32 millions d'habitants.

 

Détrompez-vous. Ce faible taux d'infection cache en fait un outrageux manque de moyens et un dépistage unique des personnes aux symptômes graves. Le pays fait actuellement face à un manque de tests PCR et se voit obligé de sélectionner les personnes à dépister, ce qui fausse considérablement le nombre effectif de cas dans le pays.

Rappelons que quasiment chaque jour le record est battu du nombre de personnes supplémentaires contaminées. 

De 1 à 10 nouveaux cas par jour il y a 1 mois, nous en sommes aujourd'hui à 200 à 350. L'Inde a battu un triste record le 6 juin de 9 887 nouveaux cas.

 

Au Népal, le virus, qui n'était présent qu'essentiellement dans les districts de la frontière sud (avec l'Inde) en raison des mouvements migratoires transfrontaliers anarchiques, est aujourd'hui partout dans le pays, dont à Kathmandu. La Police et l'armée ont longtemps tenu bon face à ces mouvements, mais force est de constater que cette barrière à cédé et que le virus s'est maintenant propagé dans 68 des 77 districts du pays.

 

Les perspectives sont donc on ne peut plus incertaines puisque le pic n'a absolument pas été atteint et nous ignorons quand il le sera. Certaines études annonçaient un pic en Inde prévu en mai ; il semble aujourd'hui plus raisonnable de tabler sur juillet, ce qui laisse présager d'encore bien des jours difficiles pour bon nombre de personnes en situation financière et professionnelle précaire.

Car ici, rappelons-le, ce n'est pas le virus qui inquiète mais les conséquences du confinement.

 

Le Népal suivant scrupuleusement la stratégie de l'Inde qui commence à se déconfiner malgré la recrudescence vertigineuse de cas, un assouplissement se fait fortement ressentir depuis maintenant 3 semaines, en tout cas à Kathmandu.

 

Aujourd'hui donc, le virus circule et le confinement n'est plus respecté en raison d'une population qui ne se confine plus, d'une Police dépassée et d'un contexte économique faisant pression sur l'Etat pour que la vie professionnelle reprenne.

 

Les rumeurs annoncent même qu'un plan de déconfinement sera bientôt annoncé par les autorités, mais il est déjà officiel que toutes les boutiques du quartier d'Asan (quartier commerçant historique de Kathmandu ayant la plus forte densité de population en journée) et de New Road (quartier moderne spécialisé dans l'électronique) ont ré-ouvert.

 

Depuis le 5 juin, les avions de rapatriement des Népalais de l'étranger commencent à être opérés, alors que presque tous les touristes désirant être rapatriés dans leur pays l'o,t été, via les vols d'ambassades et les vols commerciaux charter d'agences Népalaises. Concernant les Népalais de l'étranger, deux vols en provenance des Emirats Arabes Unis et du Myanmar ont été affrétés, ils sont les premiers d'une longue et grande vague de rapatriements et il se dit que 1 500 personnes par jour pourraient être rapatriées pour au moins 40 jours. Certains rapports annoncent même que ce sont 150 000 personnes qui doivent être rapatriées, voire plus dans certaines autres études.

Ceci est extrêmement inquiétant car le Népal n'a pas la capacité de mettre en quarantaine 1 500 nouvelles personnes par jour lorsqu'on voit que le seuls migrants venus d'Inde surchargent déjà les hôpitaux du pays.

 

Des hôtels ont été réquisitionnés et ont accepté de proposer un service commun de 2 000 Rs (environ 15 €) par jour et par personne repas inclus (entre temps, un barème tarifaire a été établi selon la catégorie d'hôtel). Ceci s'applique pour les personnes n'ayant pas de logement sur Kathmandu.

 

Mais plusieurs question se posent :

- Qui payera 14 nuits à ces personnes sur le retour, dont la plupart sont en situation financière désastreuse ?

- Comment sera assuré le suivi et le contrôle de ces milliers de personnes ?

- La quarantaine sera-t-elle respectée (nous avons constaté qu'à l'époque où les cas étaient peu nombreux les quarantaines étaient déjà incontrôlables) ?

 

Concernant le déconfinement, le Népal se prépare à une reprise de la vie quotidienne malgré le contexte peu favorable, mais il semble logique que le pays doive s'ouvrir après maintenant 2 mois et demi de confinement.

Les aéroports domestiques sont prêts à une ré-ouverture (la rumeur annonce fin juin), l'aéroport international est lui aussi prêt à une ré-ouverture, dans un premier temps pour accueillir les travailleurs migrants sur le retour, puis à l'opération des vols réguliers en second lieu (on entend parler de mi-août ou septembre...).

Quoi qu'il en soit, au vu du nombre de travailleurs migrants à rapatrier, il semble évident que les vols réguliers ne reprendront de toute façon pas avant la fin de l'été.

 

Le but est que l'économie reprenne au plus vite et que les travailleurs, entrepreneurs, fonctionnaires et autres professions libérales puissent reprendre leur activité afin de relancer l'économie et le mouvement de liquidités.

Aujourd'hui, tout commerçant et travailleur du tertiaire peut reprendre son activité malgré aucune annonce officielle.

Mais un phénomène semble apparaître, beaucoup de boutiques ouvrent (dont l'habillement), mais la clientèle n'est pas présente, sans doute faute de liquidité et dans un souci de priorisation de l'essentiel).

 

En journée, surtout le matin et le soir, on sent vraiment une effervescence dans les rues, les commerces sont ouverts, le gens déambulent, il y a parfois des bouchons à certains carrefours, un semblant de normalité qui fait peur au vu du nombre de cas présents, non dépistés, non tracés et finalement acceptés malgré un risque de désastre, assumé semble t'il.

 

Le tourisme est donc bien évidemment à l'arrêt pour encore plusieurs mois. La saison printemps a été désastreuse pour tous les acteurs du secteur, cette saison est maintenant terminée avec la mousson qui se profile.

Espérons donc que ces 3 mois de basse saison annuelle apportent de bonne nouvelles pour qu'en septembre on puisse envisager une reprise progressive du tourisme au Népal.

Espérons...

 

En marge de tout cela, des groupes de protestation commencent à s'organiser, à l'image d'une manifestation devant le palais du Premier Ministre. Ce mouvement a fait savoir la colère des manifestants, critiquant la gestion du confinement et des tests réalisés de manière désorganisée et marginale et le budget d'1.2 milliards de Dollars alloué au Covid-19 pour lequel aucun contre-rendu n'est réalisé (voir la vidéo-ci-dessous).  

 

Plus que jamais, il nous paraît donc nécessaire de continuer notre action d'aide car les personnes que nous aidons ne sont pas celles concernées par une reprise économique et professionnelle. Comme toujours, ce sont ces personnes qui sont les premières impactées par les mesures appliquées et les dernières à profiter de la ré-ouverture. 

 

Grâce à votre aide, nous avons déjà distribué 5.3 tonnes de nourriture et nous avons de quoi redonner la même aide sous 15 jours environ, de manière à assurer un suivi pour ces personnes. Mais l'anticipation des besoins du futur est le maître-mot.

 

Anticipons donc tous ensemble...

Photo : Reporters Nepal (https://en.reportersnepal.com/)
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